La Fondation Léa nature se mobilise et lance une campagne d’alerte sur les perturbateurs endocrinien
Alors que les perturbateurs endocriniens (bisphénol A, les phtalates, les parabènes, pesticides, etc.) sont suspectés de perturber notre système hormonal et nerveux...
...et de participer à l’augmentation de cancers et maladies chroniques, nous sommes exposés à ces substances chimiques à notre insu de manière répétée et simultanée dans notre vie quotidienne, et ce bien avant la naissance. Avec cette nouvelle campagne engagée, la Fondation LÉA NATURE / JARDIN BiO souhaite ainsi montrer le lien entre la pollution environnementale et l’impact sur notre santé. Elle souhaite interpeller l’opinion publique, mais aussi les politiques, pour mettre la question des perturbateurs endocriniens au cœur du débat et que des mesures de protection soient prises en faveur des citoyens et de leur santé. L’objectif est de créer une prise de conscience sur la surexposition des êtres humains aux perturbateurs endocriniens, présents dans notre environnement et dans les produits de consommation courante, et les effets qu’ils induisent sur notre santé.
QU’EST-CE QU’UN PERTURBATEUR ENDOCRINIEN (PE)
D'après l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), les perturbateurs endocriniens sont « des substances chimiques d’origine naturelle ou artificielle étrangères à l’organisme. Elles peuvent interférer avec le fonctionnement du système endocrinien et induire des effets néfastes sur l’organisme d’un individu ou sur ses descendants ». Ces produits chimiques peuvent être d'origine naturelle ou anthropique (provenant de l'activité humaine).
Des effets sur le système hormonal
Les PE exercent ainsi des effets sur les processus de synthèse, de sécrétion, de transport, d'action ou d'élimination des hormones naturelles du corps. Ils peuvent altérer le taux d'hormones dans le sang, imiter les hormones ou les inhiber. L'équilibre du système endocrinien relevant d'une régulation très fine, les dérèglements provoqués par les PE peuvent entraîner de très lourdes conséquences. En particulier, dans les premières étapes de la vie, où nos hormones jouent un rôle très important dans le développement physiologique de l'individu, les impacts des PE sur le fœtus, le nourrisson, ou l'enfant en croissance peuvent s'avérer irréversibles.
1991 : un changement de paradigme
C'est en 1991 avec la déclaration de Wingspread que des chercheurs ont pour la 1ère fois formalisé le changement de paradigme toxicologique des perturbateurs endocriniens en 4 points :
la période fait le poison : contrairement à l'adage « c'est la dose qui fait le poison », pour les PE c'est le moment de l'exposition qui compte, pas la dose, et en particulier la vie intra-utérine constitue une fenêtre de grande vulnérabilité à l'exposition aux PE ;
le délai de latence entre l'exposition et l'apparition des effets peut être important ;
la relation dose-effet n'est pas linéaire mais peut présenter, notamment, des courbes en U avec des effets plus forts à faible dose qu'à forte dose ;
l'effet cocktail : les effets d'un mélange de PE peuvent dépasser la somme des effets des substances individuelles et l'on peut aussi observer des effets en combinant des doses qui seraient sans effet prises individuellement ;
les effets transgénérationnels : par des mécanismes biochimiques complexes, désignés sous le terme d'épigénétiques, les effets des PE peuvent se transmettre sur plusieurs générations dans la descendance de l'individu exposé.
Les bouleversements induits par ce changement de paradigme constituent autant de défis pour la recherche scientifique et médicale, l'expertise en matière d'évaluation des risques et bien entendu les réponses politiques.
QUELLES CONSÉQUENCES SUR LA SANTÉ ?
Les Perturbateurs Endocriniens (PE) sont associés à toutes les maladies chroniques modernes en pleine expansion : cancers hormono-dépendants, syndrome métabolique, troubles neuro-comportementaux, atteintes à la fertilité et l'appareil de reproduction. Ils pourraient constituer l'une des clefs d'explication de ce que l'OMS désigne comme une « épidémie [mondiale] de maladies non transmissibles ».
Exemples de risques associés aux substances :
Le bisphénol A, à lui seul, est associé à des tumeurs mammaires chez la femme exposée in-utero, au diabète de type 2, à des troubles cardiovasculaires, à des troubles de la reproduction et à des problèmes comportementaux.
Les phtalates seraient responsables chez le petit garçon du syndrome de dysgénésie testiculaire (dont testicules non-descendus, distance ano-génitale réduite, incidence accrue de cancer) et de troubles métaboliques (diabète de type 2 et obésité).
Les parabènes perturberaient le fonctionnement de plusieurs hormones (œstrogènes/androgènes, hormones thyroïdiennes), et sont susceptibles de provoquer des atteintes à la fertilité et à l’activité métabolique.
Les composés perfluorés sont associés à des atteintes à la reproduction, des troubles comportementaux et à l'affaiblissement des défenses immunitaires.
Plusieurs filtres UV courants dans les cosmétiques comme les composés de benzophénone et des dérivés de camphre sont suspectés d'affecter l’appareil de reproduction de la descendance masculine des individus exposés.
Le BHA, antioxydant et conservateur couramment utilisé dans les aliments, les emballages alimentaires et les cosmétiques est associé à une baisse des niveaux d'hormones (testostérone et hormones thyroïdiennes) et des malformations des spermatozoïdes.
QUELLES CONSÉQUENCES SUR L’ENVIRONNEMENT ?
Les perturbateurs endocriniens sont omniprésents dans l'environnement : on les retrouve dans la quasi-totalité des milieux aquatiques (via les effluents de stations d'épuration, les eaux usées industrielles, les dispersions de pesticides agricoles, etc.) et dans les océans également contaminés par le lessivage des milliards de particules plastiques flottantes qui supplantent peu à peu le plancton en début de chaîne alimentaire. Cette contamination a des impacts sur la faune sauvage.
Les PE induisent chez la faune des effets sur le développement, la métamorphose (hermaphrodisme chez les amphibiens), la croissance, la reproduction, le sex-ratio, l’immunologie et favorisent certaines pathologies (telles que des tumeurs cancéreuses). Ils favorisent également les troubles neurocomportementaux (perte d’équilibre chez les insectes pollinisateurs) et les modifications des caractères impliqués dans la reproduction, la survie et l’adaptation au milieu.
Quelques exemples historiques sont fournis par le TBT (Tributyltin – dérivé de l’étain) dont l'usage dans les peintures antifouling a entraîné, dans les années 1980, des extinctions en masse chez les mollusques des zones portuaires marines, ou encore le DDT (Dichlorodiphényltrichloroéthane), un insecticide aujourd'hui interdit en France, mis en cause dans la réduction significative de la taille du pénis des alligators du lac Apopka (Floride) suite à un déversement accidentel dans ce lac.
Plusieurs études révèlent également que la féminisation des poissons proviendrait de l'exposition aux PE. Ainsi, en 2006, une étude anglaise (Gross-Sorokin et al.) a étudié les effets anatomiques dus à la perturbation endocrinienne chez les poissons dans une cinquantaine de sites contaminés. Cette étude a montré qu'un tiers des mâles présentaient un phénotype intermédiaire entre mâles et femelles. Chez les poissons les plus touchés, les spermatozoïdes montraient même une diminution de 50 à 75% de leur mobilité. Les oiseaux aussi sont touchés puisque l'exposition aux PE pourrait altérer la reproduction et le comportement chez les adultes et auraient des répercutions sur le développement des jeunes oiseaux.